Époux et partenaires politiques pendant plus de cinquante ans, l’ancien président et son épouse viennent d’annoncer leur divorce.
Laurent Gbagbo et Simone Ehivet Gbagbo étaient mariés depuis 1989. Ils ont annoncé leur divorce le 29 juin. La rupture a été prononcée « aux torts exclusifs de M. Laurent Gbagbo, pour adultère caractérisé et notoire, abandon de domicile conjugal et injures graves à l’encontre de Madame Simone » précise l’avocat de Simone Ehivet Gbagbo, Ange Rodrigue Dadjé. « Il reviendra [à l’ancien président] qui tenait tant à divorcer, de renoncer à faire appel de ladite décision de divorce, pour que son désir devienne enfin réalité » a également précisé l’avocat.
A son retour en Côte d’Ivoire en juin 2021, 10 ans après son départ, Laurent Gbagbo avait officialisé très rapidement publiquement la procédure de divorce. Ce divorce, bien plus qu’une anecdote de tabloïd, est tout à la fois intime et politique.
Le couple Gbagbo a fait figure de duo redoutable, admiré tout autant que craint. Simone Ehivet est une professeure, engagée dans le syndicalisme dès les années 1970, sa lutte pour le multipartisme la mène en prison dans la Côte d’Ivoire du président Félix Houphouët-Boigny. La rencontre en 1973 avec Laurent Gbagbo scelle son destin politique. Ils avanceront de concert dorénavant dans le milieu politique.
Alors, Laurent Gbagbo est déjà chevronné en politique et dans le militantisme marxiste. Il sort alors d’un camp d’internement militaire. Le couple participe à des cellules révolutionnaires clandestines, avant de créer ensemble en 1982, le parti emblématique de la gauche ivoirienne, le Front populaire ivoirien (FPI). Simone Ehivet est responsable de la mobilisation des bases du parti.
Le couple se marie juste après le retour à Abidjan, de Laurent Gbagbo exilé en France, en janvier 1989. Les Gbagbo habitent à Cocody Riviera, un quartier d’Abidjan, militent ensemble, font campagne ensemble. « C’était un couple très fusionnel, témoigne un ami de longue date du couple. Mais elle, ce n’est pas qu’une Madame Gbagbo, une Première Dame qui ferait dans le glamour et la représentation. C’est un pilier de la politique ivoirienne, solide, populaire, avec une personnalité très forte, de la poigne et des convictions. » Sous son influence, le catholique Laurent Gbagbo devient évangélique. Simone Gbagbo étant devenue une fervente adepte évangélique. Elle est aussi la vice-présidente de l’Assemblée nationale de 1995 à 2000, députée d’Abobo de 1996 à 2004.
Cependant dés les années 1990, le couple se meut en un partenariat politique, Laurent Gbagbo entretenant une relation avec la journaliste Nadiana « Nady » Bamba depuis 1997. Il se marie en 2001 avec la journaliste selon les rites coutumiers malinké et musulman. Ils ont un fils l’année suivante.
De 2000 à 2011, « il n’y a pas en Côte d’Ivoire un seul chef qui règne, mais deux ». Le duo se complète : à lui la conciliation. A elle, la ligne dure et sans concession. Elle est surnommée « la Dame de fer ».
Après avoir refusé de concéder la défaite en 2010 face à Alassane Ouattara, le couple est arrêté dans le bunker de la résidence présidentielle après douze jours de combats dans Abidjan en avril 2011. Simone Gbagbo est alors condamnée en 2015 à 20 ans de prison pour « atteinte à la sûreté de l’État ». Elle bénéficie en 2018 d’une loi d’amnistie, au nom de la « réconciliation nationale ». Laurent Gabgbo s’installe avec Nady Bamba en Belgique à sa libération en 2019. Politiquement leur vie ont également pris des chemins différents. Ils ont abandonné l’étiquette du FPI entre les mains de Pascal Affi N’Guessan pour fonder chacun leur propre parti : le Parti des peuples africains – Côte d’Ivoire (PPA-CI) pour lui, le Mouvement des générations capables (MGC) pour elle.
Difficile de connaître les raisons de ce divorce tardif. Certains y voient la volonté de Nady Bamba, ou bien encore la volonté de dissocier son nom de Simone Ehivet Gbagbo.