« Braquage de pouvoir », le nouvel album de Tiken Jah est sur le marché depuis le 4 novembre 2022. À l’occasion de la sortie de cet opus, l’artiste s’est prononcé sur la présence des religions coloniales en Afrique.
À RFI, Tiken Jah Fakoly a exprimé son attachement à l’Afrique. « Je suis tellement fier d’être Africain. Parce que l’Afrique c’est le continent de l’avenir », a-t-il déclaré d’entrée de jeu, avant de préciser que l’histoire de l’Afrique ne se résume pas à l’esclavage et à la colonisation : « Vous savez, pour beaucoup de personnes, y compris les Africains, l’histoire de l’Afrique commence par l’esclavage et la colonisation », a déploré Tiken Jah Fakoly, qui explique que les Africains ont été contraints de pratiquer les religions abrahamiques, notamment l’islam et le christianisme. « Ils ont imposé la colonisation, ils ont imposé l’islam et même la religion chrétienne etc. Tout a été imposé parce qu’en face, les gens étaient plus armés que nous. Il y avait toute une civilisation en place, il y avait des royaumes, il y avait des empires. L’empire du Mandingue, par exemple, a atteint son apogée en 1235, au XIIIe siècle », soutient Tiken Jah, dont les déclarations évoquent la colonisation spirituelle de l’Afrique. Mais l’auteur de « African Révolution » est « confiant que ce continent va s’en sortir un jour, quand le peuple va se réveiller, quand le peuple sera uni, parce que c’est la condition. » Selon lui, « désunis, on ne gagnera rien, on sera toujours manipulés. Mais ensemble, on a tellement de pouvoir. » « Nous sommes dans un processus de réveil », a-t-il prévenu.
Sur la Chaîne NCI, l’artiste a par ailleurs déclaré qu’ « aucun combat ne peut être gagné tant que le peuple est divisé. Le peuple a le pouvoir et ce pouvoir est concret quand le peuple est uni. L’Afrique unie gagnera tous les combats. l’Afrique divisée ne gagnera rien. »
De toute évidence, Tiken Jah Fakoly milite pour la Renaissance culturelle de l’Afrique, un concept développé par le savant Cheikh Anta Diop et porté par l’Union africaine, l’organisation panafricaine, qui a adopté La Charte pour la Renaissance Culturelle de l’Afrique, en janvier 2006, au Soudan.
Le document approuvé par les dirigeants africains indique que l’unité de l’Afrique trouve son fondement d’abord et surtout dans son histoire. Car si l’on en croit le Pr Jean-Emmanuel Pondi, vice-recteur de l’université de Yaoundé 1, « le problème réel de l’Afrique a d’abord été son identité culturelle qui a été niée, qui a été refusée et qui a été saccagée par ceux et celles qui ont cru devoir mettre les Africains en esclavage. »
C’est donc « pour remédier à l’ignorance généralisée sur le passé de l’Afrique », que l’Histoire générale de l’Afrique a été rédigée sous l’égide de l’UNESCO. Le but étant de « reconstruire une histoire de l’Afrique libérée des préjugés raciaux hérités de la traite négrière et de la colonisation et favoriser une perspective africaine. »
La Charte mentionne que, de fait, « en dépit de la domination culturelle qui, au cours de la traite des esclaves et de la colonisation, a entraîné la négation de la personnalité culturelle d’une partie des peuples africains, falsifié leur histoire, systématiquement dénigré et combattu les valeurs africaines, et tenté de remplacer leurs langues par celle du colonisateur, les peuples africains ont pu trouver dans la culture africaine les forces nécessaires à la résistance et à la libération du continent. »
Selon l’article 7 de la charte, « les États africains considèrent que l’Histoire générale de l’Afrique publiée par l’UNESCO, constitue une base valable pour l’enseignement de l’histoire de l’Afrique.» À cet effet, « Ils recommandent sa large diffusion y compris dans les langues africaines et recommandent en outre la publication de versions abrégées et simplifiées de l’histoire de l’Afrique pour le grand public. »
Cependant, de l’avis de certains observateurs, le contenu de la Charte de la Renaissance culturelle de l’Afrique reste peu connu de la population. « On a l’impression que cette charte n’est pas connue des Africains, sa mise en application traîne, les chefs d’État et les intellectuels africains n’en parlent pas », fait remarquer le journaliste Freddy Mulumba.