Chaque année, à l’approche de Noël, après les examens, les élèves estiment pouvoir partir plus tôt en congés. Une réclamation qui leur ai refusée tant que le calcul de notes n’est pas bouclé, les contraignant à rester sur place une ou deux semaines de plus.
Mécontents de ce refus, les élèves n’hésitent pas à créer des dégâts humains et matériels.
Cette année, un élève mineur a été tué à l’arme blanche dans la ville d’Issia. Une jeune fille a été blessée à Korhogo dans le nord ouest du pays.
A Taabo, dans le centre, des véhicules des forces de l’ordre ont été détériorés.
Depuis la fin des années 1990, c’est devenu une sorte de tradition à l’approche des fêtes de fin d’année : les élèves réclament leurs « congés anticipés ».
Ce qui a commencé par n’être que des étudiants du secondaire qui demandent à avancer le début de leurs vacances en semant quelques troubles, est devenu un déchaînement de violence, parfois meurtrier.
En décembre 2019, trois élèves avaient été tués lors d’affrontements dans les villes d’Anyama, de Dimbokro et de Daloa.
Le cas Vavoua, dans l’ouest du pays
Mercredi 8 décembre 2021, le porte-parole du gouvernement ivoirien s’est réjoui que la tension soit un peu retombée dans tout le pays, soulignant que seuls 9 départements étaient encore concernés contre 27 en début de semaine.
A Vavoua, le lycée est encore fermé et le corps enseignant est toujours en grève : en début de semaine dernière, des individus non identifiés, munis d’armes blanches et de gourdins ont mis le feu au bâtiment administratif où le proviseur et des professeurs s’étaient réfugiés.
« Les professeurs ne sont pas payés pour prendre des cailloux sur la tête », avait déclaré Bonaventure Kalou, le maire de cette commune. « Tant que les élèves et les enseignants ne sont pas en sécurité, le préfet et le proviseur ne rouvriront pas le lycée. »
Un gouvernement attendu au tournant
Le gouvernement ivoirien, démuni face à ce phénomène, a annoncé des « sanctions administratives », voir « judiciaires » pour les cas les plus graves.
Des propos déjà tenus en 2019 pour dissuader les élèves et qui, de toute évidence, n’avaient pas suffit à mettre un stop à cette « tradition ».
La nouvelle ministre, Mariatou Koné, était attendue sur cette question et avait tenté de sensibiliser les élèves en se déplaçant dans les écoles pour leur demander de respecter le calendrier fixé. En vain.
Selon Théodore Gnagna Zadi, le président d’une centrale syndicale : « La disparition progressive ces trente dernières années des internats, des cantines, et des bourses pour les plus démunis explique les débordements actuels. Ces dispositifs faisaient la force ivoirienne, et elle était respectée par les élèves pour ça. Aujourd’hui, dans les villes de l’intérieur du pays, il arrive que les jeunes des villages louent ensemble des petites maisons, vivent ensemble et cuisinent pour survivre. Ils ne sont pas encadrés. »
Plusieurs spécialistes pointent un ascenseur social en panne et l’absence de l’autorité parentale : « les récentes violences sont le fruit d’une société ivoirienne en crise de valeurs aggravée par la décennie de conflits que le pays a connue », s’attriste M. Gnagna Zadi.