Le programme de déradicalisation lancé par le Nigeria s’avère être décevant pour les déserteurs de Boko Haram. Manque d’argent et de travail, ils sont loin de ce que le gouvernement nigérian leur avait promis…
Lancé en 2016 par le gouvernement nigérian, le programme « Safe Corridor », a pour objectif de « déradicaliser » les anciens combattants djihadistes.
Ces derniers sont de plus en plus nombreux à se repentir de leur vie passée au sein du groupe djihadiste Boko Haram et tentent de se réintégrer avec leurs familles, dans la société.
Une formation de déradicalisation en six mois
Seulement, après des années de détention traumatisantes, ils se retrouvent dans des camps où argent et travail manquent.
Tous les repentis ne sont cependant pas éligibles de la même manière. Selon le profil des différents combattants, la menace qu’ils représentent est minutieusement analysée. Après quoi, ils sont transférés dans un centre de déradicalisation à Mallam Sidi, dans l’État de Gombe, au nord-est, où ils suivent des cours d’alphabétisation, une formation professionnelle et religieuse et où ils reçoivent une aide psychosociale. Une formation qui devrait durer six mois.
En parallèle, le programme mène des offensives militaires contre les insurgés de Boko Haram et de l’Iswap (l’État islamique en Afrique de l’Ouest, sa branche dissidente).
En dix ans, le conflit fluctuant a fait plus de 40 000 morts et plus de 2 millions de déplacés.
Le programme a été financé par les États-Unis, la Grande-Bretagne et l’Union européenne à hauteur de millions de dollars, soutenu par l’Organisation internationale pour les migrants (OIM) et coordonné par l’armée nigériane.
Selon une déclaration faite à l’AFP début juillet, le général Mohammed Maina, à la tête du programme : « Plus de 800 non-combattants repentis ont été déradicalisés, réhabilités et réintégrés avec succès ».
Des témoignages peu glorifiants pour le programme
Du côté des repentis, le discours n’est pas le même. Les témoignages remettant en doute le programme, s’empilent.
Après avoir prêté allégeance au Nigeria et promis de ne pas retourner combattre, les pensionnaires de cette formation reçoivent généralement 20 000 nairas chacun (42 euros) et sont envoyés dans un centre de transit avant d’être libérés.
Après quoi, ils retrouvent leurs familles dans des camps de déplacés, à la merci de malnutrition, considérés comme des parias par la société qu’ils voulaient réintégrer, sans emploi et avec un euro par jour, sans perspective d’avenir. Les gens sont en colère.
335 nouveaux repentis devraient intégrer très prochainement le programme. Le gouvernement espère que des milliers d’autres insurgés rejoignent le programme à leur tour, mais pour cela, les autorités nigérianes doivent montrer qu’elles « sont capables d’accompagner les détenus jusqu’à l’obtention de leur diplôme et de les réintégrer dans la société en toute sécurité. Mais à ce jour, « Safe Corridor », n’est pas en mesure d’offrir ce type d’assurances », d’après le cercle de réflexion International Crisis Group (ICG).