Un an après sa retraite des terrains, Didier Drogba est toujours « accroché » au football de son pays. Il compte s’y investir, mais cette fois-ci, comme dirigeant. L’ex-international ivoirien, âgé de 41 ans, a officialisé sa candidature pour briguer la présidence de la Fédération ivoirienne de football (FIF), il y a de cela quelques semaines. Mais ses ambitions n’ont pas l’aval de certains responsables du ballon rond.
Assurément, sur le plan international et dans les instances du football mondial, l’ex-capitaine des Éléphants a de l’influence. « Être entraîneur ne m’intéresse pas. Je suis un leader, ma vision est plus grande que le rôle d’entraîneur », a déclaré Didier Drogba lors d’une rencontre avec des hommes d’affaires à Abidjan, jeudi 12 septembre 2019.
Cependant, sa notoriété et sa détermination à donner un nouveau souffle au football ivoirien suffiront-elles à rallier à sa cause les dirigeants sceptiques ?
En effet, dès l’annonce officielle de sa candidature, celui que les Ivoiriens surnomment ‘’Dahi zoko’’ a été l’objet de critiques, et s’est heurté à la réticence de certains présidents de clubs qui lui refusent leur soutien.
Plusieurs clubs de la ligue1 étaient absents à la présentation de son projet concernant «La renaissance du football ivoirien », mercredi 13 et jeudi 14 novembre 2019 à Abidjan. Trois clubs sur 14, à savoir l’ASEC d’Abidjan, la SOA et l’AFAD étaient au rendez-vous.
À propos de sa non-présence, Vagba Alexis, le président de l’Africa Sport d’Abidjan, qui s’est confié à un confrère, déclare : «Oui, je savais, mais il ne m’a pas invité. Il n’y avait que trois clubs de première division. (…) Je ne suis pas obligé de le rencontrer. Est-ce que Drogba nous a aidés une fois?»
Oumar Ben Salah, champion d’Afrique en 1992 au Sénégal, rame à contre-courant de la candidature de Didier Drogba. L’ex-international ivoirien, qui fustige la décision de l’ancien capitaine des Éléphants, relève qu’il n’a pas les capacités et les compétences pour gérer la FIF. Pour lui, « Drogba devrait apprendre aux côtés des anciens. Je me demande si Didier Drogba a bien réfléchi. Il a un grand nom, il a mouillé le maillot pour l’équipe nationale, même s’il n’a pas gagné la CAN. La FIF, c’est trop tôt pour Didier (…) Il a un handicap : on ne l’a jamais vu s’approcher des gens du foot, même des anciens joueurs. (…) Il a joué au haut niveau, mais cela ne suffit pas pour vouloir venir diriger la FIF », soutient Oumar Ben Salah dont les propos sont rapportés par les journaux ivoiriens.
Jacques Anouma a décidé de ne pas se prononcer pour l’instant : « J’ai reçu Drogba sans lui promettre mon soutien. Pour le moment, je ne soutiens personne », a confié à la presse l’ancien président de la FIF.
Pour Didier Drogba qui recevait des dirigeants de club, ces accusations n’ont point de raison d’être. « Sachez que je ne suis pas venu pour diviser. Bien au contraire, je serai le candidat de tout le monde. Je suis là pour que tous les clubs de mon pays bénéficient des bienfaits de mon projet. (…) Je n’ai jamais dirigé une institution comme la FIF, mais j’ai une expérience dans ce domaine qui n’est pas négligeable. Il faut savoir s’entourer et je pense qu’en Côte d’Ivoire, il y a des personnes très compétentes pour m’accompagner sur ce projet », a-t-il indiqué.
Concernant le boycott dont il est l’objet, ll s’est voulu conciliant. « Je sais que des gens ont demandé à certains grands frères, dirigeants de club, de ne pas venir à ma réunion. Ce n’est pas grave. Qu’ils sachent que je viendrai les voir individuellement pour que nous parlions. Je suis convaincu qu’ils apprécieront mon projet qui prône le développement intégral du football ivoirien», a-t-il révélé.
De fait, ce projet a séduit certains dirigeants, notamment Koné Abdoulaye, le président de l’AS Denguelé. «J’ai été épaté par le programme de Didier Drogba. S’il est mis en oeuvre, il va permettre au football de renaître. Ce projet va permettre au football de se relever. Le football actuel est dans le coma. Le football local est pratiquement mort. Si le projet est mis en oeuvre dans quelques années, la Côte d’Ivoire va retrouver son lustre d’antan», a-t-il confié à l’occasion de la réunion dédiée aux clubs évoluant en Ligue 2.
Dans un pamphlet publié sur sa page Facebook, l’écrivain Alain Tailly a abordé la polémique suscitée par cette affaire.
Selon lui, la question « est symptomatique de la mentalité de sous-développement des Africains. Cette mentalité est le résultat d’un habile travail de déconstruction culturelle, psychologique et morale des peuples africains dont nous, les Ivoiriens, faisons partie intégrante et intégrale. C’est cette pathologie mixte, mélange de rebuts occidentaux et de sous-culture africaine, qui se manifeste sous la forme du refus du progrès, de l’amélioration, du bien-être et donc, sous la forme du rejet du développement. »
En effet, pour l’ancien directeur général du bureau ivoirien du droit d’auteur (BURIDA) et du Centre national des arts et de la culture(CNAC), qui qualifie de pathétique cette affaire, le candidat Didier Drogba vient de présenter un projet et « une vision radieuse de l’avenir du football ivoirien », le tout accompagné d’un carnet d’adresses impressionnant.
« Nous détruisons les opportunités, l’énergie et les talents qui peuvent nous apporter le changement positif, la lumière, le progrès et la prospérité », a-t-il regretté, car dira-t-il, « le respect et la bienséance auraient conseillé d’aller, du moins, écouter le message du candidat Drogba. »
En somme, le penseur dénonce «notre préférence pour l’intérêt personnel immédiat et éphémère au détriment de l’intérêt collectif plus profitable et plus durable. » À l’en croire, « ce qui l’est du football l’est aussi pour le pays. »
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