Un courrier qui a été adressé par deux sénateurs américains au département de la sécurité intérieure, à propos du travail des enfants dans la cacaoculture en Côte d’Ivoire, et qui pourrait conduire à un éventuel embargo sur le cacao ivoirien, a fait réagir les autorités du pays.
En septembre 2019, l’épouse du président Alassane Ouattara a été dépêchée aux États-unis d’Amérique comme avocate de la cause de l’État ivoirien.
Dominique Ouattara, par ailleurs présidente du Comité national de surveillance des actions de lutte contre la traite, l’exploitation et le travail des enfants (CNS), s’est entretenue mardi 17 septembre au Senat Building à Washington DC, avec les sénateurs Ron Wyden et Sherrod Brown, auteurs de la lettre adressée au département de la sécurité intérieure des États-Unis, et relative à un éventuel embargo sur le cacao ivoirien.
Selon une note du service de communication de la première Dame de Côte d’Ivoire dont nous avons reçu copie, cette rencontre a été l’occasion pour la présidente du CNS d’éclairer les lanternes.
Dominique Ouattara a déclaré que toutes les études comme celles de ‘’Vérité’’ et de ‘’Walk Free Fondation’’ estiment à 0,17% le nombre d’enfants victimes de travail forcé dans la cacaoculture. « Un chiffre très bas, mais néanmoins intolérable car, rien ne justifie que l’on fasse travailler des enfants », a-t-elle ajouté. Telle est l’une des raisons dira –t-elle, qui a emmené le gouvernement ivoirien à rendre l’école obligatoire en 2016, pour tous les enfants âgés de 6 à 16 ans, tout en adoptant des lois et des décrets pour réprimer la traite, l’exploitation et le travail des enfants.
De fait, pour la présidente de Children of Africa, « Si cette mesure venait à être appliquée, ce serait une catastrophe pour des milliers de petits producteurs de cacao et leurs familles qui vivent dans des conditions déjà difficiles et qui représentent au moins 6 millions de personnes qui vivent directement de la cacaoculture. »
Les sénateurs Ron Wyden et Sherrod Brown ont déclaré que leur action ne vise pas à desservir la Côte d’Ivoire, mais qu’ils attendent plutôt des actions concrètes de la part de l’industrie du cacao et du chocolat.
Cette réponse à l’émissaire du chef de l’Etat ivoirien est d’autant plus diplomatique, qu’en octobre dernier, les américains sont revenus à la charge.
Ils s’indignent du travail des enfants dans les champs de cacao en Côte d’Ivoire, brandissant toujours la menace d’un embargo sur le cacao ivoirien.
Les sénateurs américains Ron Wyden et Sherrod Brown vont plus loin. Ils demandent au département américain de la sécurité intérieure de mettre un embargo sur le cacao en provenance de la Côte d’Ivoire. Ce, suite à une enquête diligentée sur le travail des enfants dans le secteur de la cacao-culture en Côte d’Ivoire.
En outre, Il ressort d’une étude menée par le département du travail américain qu’il y aurait des centaines de milliers d’enfants qui travaillent dans les plantations de cacao en Côte d’Ivoire.
Le rapport de cette enquête révèle que ces enfants vivent en campagne et reçoivent des miettes après avoir effectué des tâches dangereuses.
Mme Dominique Ouattara, la présidente du CNS, souhaite que soit mise sur pied une plate-forme de négociation et plaide pour la non-exécution de cette mesure. Car dira–t-elle, « la menace d’un embargo des Etats-Unis qui plane aujourd’hui sur le cacao ivoirien est non seulement loin de freiner le travail des enfants, mais ruinerait tous les efforts consentis. »
En première analyse, la menace d’un embargo est une manière pour les sénateurs américains de mettre la pression sur le gouvernement ivoirien pour agir davantage contre le travail des enfants dans ce secteur. Toutefois, il ne faut pas perdre de vue qu’il peut y avoir des motivations sous-jacentes.
L’effet boomerang
Deux sénateurs américains, du jour au lendemain, décident d’engager une procédure auprès de leur gouvernement, afin qu’il impose un embargo sur le cacao ivoirien, au motif qu’il serait le fruit du travail d’enfants. Cette affaire, qui trouble le sommeil du pouvoir d’Abidjan, aurait été révélée par un journal américain.
Selon Justin Koné Katinan, porte-parole de l’ancien président ivoirien, Laurent Gbagbo, qui s’est confié à un confrère ivoirien, « Il s’agit de lobbies qui servent d’écran de fumée opaque qui cache les intentions réelles des vrais maîtres d’ouvrage. Le théâtre favori de leurs opérations reste le faible continent africain, qui ne souffre pas seulement de sa faiblesse économique, mais tout aussi d’un déficit de patriotisme qui fait que lorsque ces lobbies frappent un adversaire politique, les autres Africains applaudissent des deux mains. Le président Laurent Gbagbo et le FPI en ont souffert. L’ONG Children of Africa était en avant-poste de cette campagne de dénigrement. »
En effet, « à peine arrivé au pouvoir dans le dernier trimestre de l’année 2000, le président Laurent Gbagbo avait fait face à plusieurs actions des mains prédatrices qui agissaient par leurs différents relais nationaux et internationaux. Le travail des enfants est exploité contre lui. Une campagne faisait passer le président Gbagbo pour un esclavagiste qui emploie des enfants esclaves dans les champs de cacao. En 2011, dans la crise qui a suivi les élections, les mêmes n’ont pas hésité à demander que leurs parrains imposent un embargo sur l’exportation du cacao ivoirien sans tenir compte des conséquences d’une telle mesure sur la Côte d’Ivoire et les paysans. Il fallait affaiblir Laurent Gbagbo pour le faire tomber par tous les moyens », explique-t-il.
À en croire ce proche de Laurent Gbagbo, « comme aujourd’hui, il a fallu que les intérêts d’un trader et puissant chocolatier soient menacés pour que le travail d’enfants esclaves dans les champs de cacao, que l’on ne cesse d’agiter comme une sorte de chiffon rouge, apparaisse soudainement. »
Ainsi, la nouvelle campagne d’enfants esclaves dans les plantations de cacao, avec la menace d’un embargo brandie, pourrait être orchestrée par des mains obscures pour leurs intérêts « capitalistes ».
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