Près de deux ans après l’attentat de Grand-Bassam faisant 19 morts, la Côte d’Ivoire a pansé ses plaies. Passée la crise politico-militaire entourant l’élection en 2010 d’Alassane Ouattara, le pays peut se targuer d’être l’un des plus stables du continent où la coexistence religieuse agit comme un élément pacificateur.
Pour les habitants de la cité balnéaire de Grand-Bassam, le souvenir reste vivace. Le 13 mars 2016, une gigantesque fusillade éclatait dans le quartier touristique. Le bilan est lourd : 19 morts, dont 10 Ivoiriens et 4 Français. L’attaque est revendiquée le soir même par Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi). Pour Alassane Ouattara et l’ensemble des 23 millions de citoyens, le choc est grand. Et le doute subsiste : le pays va-t-il replonger dans un contexte de violence digne de la guerre civile de 2002-2007 ou de la crise entourant l’élection présidentielle de 2010 ?
Une grande diversité religieuse
Près de deux ans après l’attentat, la quiétude régnant à Grand-Bassam et à Abidjan, la capitale, prouve que le pays a fait le deuil. Alors que les enquêtes ont conduit à l’arrestation de 38 personnes et permis de comprendre les liens entre les attentats commis au Mali, en Côte d’Ivoire et au Burkina Faso, l’intégrisme religieux ne s’est pas immiscé dans la cohabitation interreligieuse. Tant mieux, car cette dernière fait partie des piliers de la démocratie ivoirienne.
Pour rappel, il existe près de 70 groupes ethniques différents en Côte d’Ivoire. L’Islam est la religion la plus pratiquée (près de 40 % des croyants) tandis que le christianisme a de nombreux adeptes (33 % environ, dont près de 17 % de catholiques). Ces derniers peuvent d’ailleurs se rendre dans la basilique Notre-Dame de la Paix de Yamoussoukro, l’édifice religieux catholique le plus grand au monde.
Le respect de la laïcité
La religion n’a jamais été la cause des émeutes qui ont émaillé le pays depuis le début du siècle. Même lors de la crise de 2010 qui a fait plus de 3 200 victimes, la raison majeure des combats était politique, opposant les militaires pro-Gbagbo (le président sortant) et les Forces républicaines de Côte d’Ivoire (FRCI). La Constitution de 2000 garantit une liberté religieuse totale comme dans n’importe quelle grande démocratie multiethnique. Enfin, il est intéressant de constater que la cohabitation religieuse est également territoriale : l’islam est la religion dominante au nord ; le christianisme est la celle qui est la plus représentée au sud.
Facilitateur de paix
Bien sûr, la crise de 2010 a laissé quelques traces qui se témoignent par des tensions isolées. Certaines églises ont été attaquées ces dernières années par des bandes armées ou des personnes issues de l’immigration vivant dans une grande précarité. Mais le dialogue interreligieux continue de bien fonctionner sur l’ensemble du territoire. Un exemple saisissant : en mars 2016, quelques jours après l’attentat de Grand-Bassam, Mgr Alexis Touably, évêque d’Agboville et Président de la Conférence épiscopale de Côte d’Ivoire, avait envoyé un message de paix et appelé la population à éviter de faire l’amalgame entre les attentats et l’islam.
Les imams ivoiriens en font de même dès qu’une occasion se présente. C’était le cas en mai 2017 lors de la réhabilitation de la grande mosquée de Tafiré où Tiémoko Meyliet Koné, gouverneur de la Banque centrale des États de l’Afrique de l’Ouest (BCEAO), avait prôné un message d’amour et de coexistence pacifique avec les autres confessions religieuses. À l’instar d’Abidjan, marquée par une forte mixité, la Côte d’Ivoire peut s’appuyer sur une certitude : celle que la cohabitation religieuse est la meilleure des armes contre le terrorisme.
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